Après le livre éponyme d'Olivier Bourdeaut, son adaptation téâtrale nous a séduit...

Il y a quelques mois déjà, nous nous étions penchés sur l’œuvre du même nom de l’écrivain Olivier BOURDEAUT. Ce livre fut, force est de la constater, une franche réussite, primé par France Culture, le Grand Prix RTL et France Télévisions, en 2016. Le romancier nantais nous a d’emblée entraînés dans sa danse folle.

Le défi était, pour cette adaptation, de réussir à reconstituer cette folie ambiante, cet amour libre, tout comme cette atmosphère anxiogène par moment. Il faut l’admettre, le travail de mise en scène de Victoire BERGER-PERRIN ne nous a pas laissés indifférents ! Nous sommes guidés dans le récit, tant dans les moments de joie que de tristesse, par cette chanson éponyme de Nina SIMONE. Ce tissu de mensonges que construisent ces personnages loufoques est attachant et nous finissions par rentrer dans la danse de cette famille qui semble si heureuse ; danse cassant les codes d’une société-modèle et ne respectant aucune règle ou usage. Vous en tomberez inéluctablement amoureux !

L’adaptatrice ne s’est pas trompée dans le choix de ses comédiens. Anne CHARRIER est habitée, corps et âme, de la folie caractéristique de la mère. Didier BRICE, le père, nous séduit en étant cet adroit diapason en phase avec la folie de sa femme. Enfin, le fils, Victor BOULENGER, narrateur et acteur nous touche par son innocence, sa naïveté et parvient à nous faire vivre cette histoire dans les yeux d’un enfant de 10 ans.

C'était à peine visible à l'œil nu, mais il y avait un changement d'air, d'humeur autour d'elle. Nous n'avons rien vu, seulement senti. Sur elle, il y avait de petits riens, dans ses gestes, le clignement de ses cils, ses applaudissements, un tempo différent. Au début, pour ne pas mentir, nous n'avons rien vu, seulement ressenti. Nous nous étions dit que son originalité continuait à monter les escaliers, qu'elle avait atteint un nouveau palier. (...) Alors nous avons continué notre vie, nos fêtes, nos voyages au paradis.

- Extrait du livre En attendant Bojangles, Olivier Bourdeaut

Tout le travail de décors, réalisé par Caroline MEXME, est, lui aussi, remarquable par sa sobriété ne faisant pas écran au jeu d’interprétation des personnages, mais étant suffisamment élaboré pour poser le contexte de la scène. Ce dernier est composé de trois décors légers, appuyés d’un habile jeu de lumière évocateur des ambiances. Tantôt d’un appartement bourgeois aux plantes vertes et aux tableaux d’ancêtres ; tantôt d’une terrasse en Espagne aux fleurs exotiques, jusqu’aux murs ocre d’un hôpital éclairé de néons. Il fut aussi agréable d’observer certaines scènes dont on ne perçoit que les ombres de ce qui se déroule derrière un rideau blanc, dans des moments romantiques comme dramatiques.

Sans vous en dire plus, nous vous recommandons grandement ce « bordel perpétuel», cet « amour fou », « cette danse endiablée » au travers desquels Mister Bojangles saura vous guider vers l’inexorable descente dans les méandres de la folie, littérale cette fois-ci. Comme si cette bourrasque de folie jusqu’alors refrénée de madame Marguerite (ou Hortense ou Georgette ou Renée ou Constance) se déliait et jetait un trouble immense dans l’esprit, faussement insouciant, d’une femme dont on assiste à la déchéance psychiatrique, au fil du récit.